07 janvier 2006

Jean Borella, Des sciences inhumaines, (note de lectura)





Texte publié dans le numéro 194 de la Pensée Catholique en 1981.

Le vingtième siècle est celui des sciences humaines. Marx et Freud sont les maître à penser les plus prestigieux de l’empoisonnement idéologique contemporain, au point où leurs idées sont devenues des lieux communs de la civilisation euroaméricaine.

Marx est le fondateur de la science de l’homme collectif, c’est-à--dire de l’homme économique.

Freud est le fondateur de la science du psychisme individuel, c’est-à--dire de l’homme désirant et désiré.

Même si le marxisme et le freudisme sont rejetés, leurs habitudes mentales restent là: les sciences mentales prétendent être les seules voix autorisées à parler de l’homme. L’attitude du savant qui prend ses distances par rapport de l’objet de son étude est celle d’un clerc imbu de son savoir qui est éloigné des besoins spirituels du peuple.

En dépit de ce que l’on pense, le Moyen Age européen avait mis des cultures en contact, sans susciter pour autant l’étonnement de Montesquieu: “Comment peut-on être Persan?” Chaque culture était regardée comme également possible.

« Pour l’homme médiéval, c’est son rapport à Dieu et à la religion du Christ qui définit sa normalité. Autrement dit, ce qui définit la nature humaine, c’est d’être « image de Dieu ». Mais lorsque cette relation au Principe divin disparaît, la nature humaine doit trouver sa définition en elle-même. C’est alors que la civilisation européenne élabore cette conception de l’homme qui prend pour modèle la raison et la sensibilité de l’européen post-médiéval et qu’elle l’universalise en l’identifiant à l’homme en général : toute civilisation qui produit des hommes non conformes à ce modèle unique apparaît comme une anomalie. »

Nées au XIXe siècle, l’ethnologie, l’anthropométrie et l’anthropologie se proposent d’étudier l’homme comme une espèce parmi d’autres espèces. Désormais l’homme sera considéré comme un objet, incapable de parler de soi-même.

La sociologie n’est que l’anthropologie qui étudie la société éuro-américaine, avec les mêmes outils.

L’attitude “scientifique” dans tous ces cas est celle de la “distanciation” par rapport à l’objet de l’étude et l’indifférence par rapport à ce que celui-ci peut dire de lui-même.

« […] en étudiant sociologiquement l’ethnie européenne, on se condamnait en même temps à ne voir en elle que ce qui ne mérite plus d’exister. »

L’apparition des sciences humaines contribue à l’accélération historique.

L’accélération historique est inséparable de l’apparition de la conscience historique.

La conscience historique est la conscience de la radicale hétérogénéité du passé par rapport au présent.

« […] la révolution était accoucheuse de l’histoire, parce que, introduisant un changement brutal dans la continuité du devenir humain, elle rompt cette continuité et transforme définitivement le passé en histoire en détruisant ses prolongements dans le présent, c’est-à-dire en détruisant la tradition. »

La science nommée « histoire » apparaît ai XIXème siècle, comme fille de la funeste révolution française.

La plus grande promesse de la révolution est que le passé est aboli.

L’homme médiéval et antique n’avait pas de conscience historique, toutes les générations étaient en quelque sorte contemporaines, parce que la tradition les unissait. Par contre, l’homme moderne est isolé dans son présent, adulte perpetuellement renaissant, adulte sans enfance et sans souvenir.

Thèse: « Parce que le sociologue ne peut étudier que ce qui est revêtu de la qualité «d’objet », et que cette objectivité ne peut être obtenue qu’au prix d’une mise à distance temporelle, étudier un phénomène social quelconque et le considérer comme une survivance historique, constitue une seule et même opération à double face. »

Chaque fois qu’un sociologue et un psychologue se penche sur un problème il dénonce la survivance d’une structure oppressive qui vient du passé.

« […] loin d’améliorer le sort et les mœurs de la présente humanité, la destruction des séculaires équilibres que la tradition nous avait légués et qui comportaient assurément une part d’imperfection, ne laissa place qu’à la confusion, au désordre et à l’affaissement profond des âmes déréglées. »

L’œuvre la plus mortifère qu’un révolution engendre s’exerce moins sur les choses qu’elle supprime que sur les mentalités qu’elle pervertit.

Le concile Vatican II a été un réglement de compte entre les évêques et la curie romaine. Les premiers en avaient assez de la soumission qu’ils devaient au Pape. La maladie de l’esprit conciliaire se reflète dans la réforme liturgique, tant celle du rite de la messe que celle du calendrier liturgique.

Les ecclésiastique ont décrété que:
- que le peuple ne supportait plus le latin;
- que les prières au bas de l’autel étaient ridicules;
- que l’offertoire était trop long;
- que le canon romain était mal composé;
- que le prêtre devait regarder les fidèles,
- que l‘agenouillement à la communion était humiliant;
- que les signes de croix étaient trop nombreux;
- que la messe des morts était inutile;
- que les processions étaient triomphalistes;
- que le culte du Saint-sacrement était idolâtre et superstitieux,
- que la vénération des saints et le cycle de leur fête radicalement païens sinon magiques;
- etc.

Et les églises se sont vidées.

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